Le digital / web : une “vieille” industrie comme les autres
Le regard de Christophe Thil, fondateur de Blueboat, pour le rapport Onclusive 2026
Depuis plus de vingt ans, Blueboat accompagne les entreprises dans leurs stratégies web. Et avec le recul, une évidence s’impose : le digital n’est plus une terre vierge d’expérimentation.
C’est une industrie à part entière, avec ses cycles, ses métiers, ses codes et ses responsabilités.
C’est le constat partagé par Christophe Thil dans le rapport Onclusive 2026 : RP, Com & Marketing : Horizons 2026, une étude de référence pour les professionnels du marketing, de la communication et des RP.
« Quand on me demande quelles sont les tendances à venir dans nos métiers du web, je ne peux m’empêcher de jeter un œil dans le rétroviseur. En observant les 25 années écoulées, le chemin parcouru est impressionnant. Et j’en arrive à une conclusion : nous sommes désormais une vieille industrie, comme les autres. » — Christophe Thil, Blueboat
25 ans d’évolution fulgurante
Ceux qui travaillent dans le web depuis ses débuts ont vécu toutes ses grandes étapes, que l’on peut résumer en quatre grandes phases.
- Les débuts (à partir de 2000)
Au début des années 2000, les premiers sites web font leur apparition, essentiellement vitrines. Les internautes ne sont pas encore happés par le flux continu d’informations. Le web reste un espace de découverte, un terrain de jeu pour les pionniers.
- L’avènement de l’utilisateur-acteur (à partir de 2008)
Le consommateur acquiert un super pouvoir : celui de s’exprimer librement, partout, tout le temps.
Forums, blogs, puis réseaux sociaux… autant d’espaces où les marques découvrent, parfois avec douleur, que la parole est désormais partagée.
- La phase de maturité ou de Far West, selon le point de vue (à partir de 2012)
Le secteur se professionnalise, se spécialise, innove.
Les marques prennent enfin conscience du pouvoir du web, de l’importance des parcours clients et de leur impact direct sur le chiffre d’affaires.
C’est aussi l’époque des grands concepts : “ubérisation”, “hyper-socialisation”, “community management”… autant de buzzwords révélateurs d’un écosystème en pleine effervescence.
- La révolution industrielle du web (depuis novembre 2022)
Et puis arrive l’intelligence artificielle.
En un éclair, nous voilà propulsés dans notre propre révolution industrielle.
Comme le chantaient Bigflo et Oli : “ça va trop vite”. Oui, cette industrie va trop vite.
« Je me demande : est-ce une bonne chose ? Ou bien le début de la fin de ce que j’aimais tant dans cette époque de pionniers, de défrichage ? »
Une industrie désormais confrontée à ses grands enjeux
Ce qui conforte l’idée que le digital est devenu une industrie comme les autres, ce sont les enjeux auxquels nous faisons face aujourd’hui.
Des enjeux comparables à ceux des secteurs “traditionnels” : environnementaux, sociétaux et économiques.
Enjeux environnementaux : la nécessaire révolution e-verte
Avec cette révolution portée par l’IA, il devient impératif de se poser la question de notre impact environnemental.
La production de nos ordinateurs et smartphones, souvent renouvelés chaque année, émet une quantité de gaz à effet de serre considérable. L’extraction des terres rares, indispensable à leur fabrication, est loin d’être neutre pour la planète.
« À titre d’exemple, la réponse à une requête pour ChatGPT 5 consomme jusqu’à 20 fois plus d’électricité que le premier ChatGPT, sans parler de l’eau utilisée pour refroidir les serveurs. »
La liste est longue et surtout, elle s’allonge rapidement.
L’avenir de notre industrie passera par une prise de conscience réelle et par une révolution e-verte.
Nous devons inventer un web plus responsable, plus sobre, sans renoncer à la performance.
Enjeux sociétaux : la place de l’humain dans la nouvelle révolution
Comme toute industrie, nous devons aussi nous interroger sur notre rôle dans la société.
Ces dernières années, le développement de la vente en ligne a mis en lumière l’impact humain des chaînes logistiques : ces “petites mains du carton” sans lesquelles le e-commerce ne tourne pas.
Les réseaux sociaux, eux, ont révélé d’autres dérives : addiction, désinformation, dépendance émotionnelle…
Et demain, une nouvelle question s’impose : quelle place donnera-t-on à l’humain face à l’intelligence artificielle ?
« Combien de salariés dans le juridique, la médecine, la communication, ou dans certaines fonctions support vont tout simplement perdre leur emploi ? »
La société va s’adapter, bien sûr. Mais, dans le numérique, tout va vite. Très vite.
C’est pourquoi il faut réfléchir vite, pour s’adapter vite.
Enjeux économiques : de la période du défrichage à celle de la rationalisation
Durant cette période de “Far West”, de nombreuses initiatives ont vu le jour : certaines ont réussi, d’autres ont échoué. Mais elles ont permis un défrichage massif.
Aujourd’hui, les opportunités de business “neufs” sont plus rares.
Les projets doivent réinventer des modèles existants, prouver leur solidité dès le départ, afficher des KPI robustes pour séduire investisseurs et partenaires.
Même les banques connaissent désormais les codes du secteur.
Une tendance intéressante émerge : la revente de sites web à modèle économique stable, rentable, déjà éprouvé.
Un marché qui ressemble de plus en plus à celui de l’immobilier : le website flipping.
« Nos métiers et nos prestations seront de plus en plus questionnés, évalués, challengés. Le web ne sera plus ce terrain d’expérimentation sans limites. »
Pendant longtemps, le digital a été perçu comme une planche de salut pendant les crises.
Aujourd’hui, il redevient un outil et un canal d’acquisition parmi d’autres, jugé à l’aune de son efficacité.
Fin de l’eldorado ?
Nos métiers et nos prestations seront de plus en plus questionnés, évalués, challengés.
Le web ne sera plus ce terrain d’expérimentation sans limites qu’il a été pendant deux décennies, même en temps de crise.
Pendant longtemps, le digital a été perçu comme la planche de salut lorsque l’économie “classique” vacillait.
Mais aujourd’hui, il retrouve sa juste place : un outil, un canal d’acquisition parmi d’autres, jugé à l’aune de son efficacité et de sa contribution réelle à la performance des entreprises.
Cette rationalisation n’est pas une régression, mais un signe de maturité.
Elle nous oblige, en tant que professionnels du web, à redoubler d’exigence, à ancrer nos stratégies dans le concret, à démontrer la valeur ajoutée de chaque action.
Nous faisons partie des “dinosaures du web” et c’est une force
« Pendant 25 ans, nous avons dû expliquer notre industrie aux autres. Aujourd’hui, nous nous apprêtons à laisser la place à une nouvelle génération.
Le web a atteint sa maturité.
Et cette maturité, c’est aussi celle des professionnels qui l’ont vu naître, grandir et se transformer.
Nous entrons dans une phase où la transmission devient essentielle : transmettre une expérience, une culture du web, une vision responsable et durable.
Chez Blueboat, nous avons toujours cru que le web devait rapprocher les marques de leurs clients, pas simplement les faire parler plus fort.
Et c’est cette conviction que nous continuons d’expérimenter, d’apprendre, mais surtout de partager cette expérience pour aider les entreprises à piloter leur croissance digitale.
Le rapport complet « Communications & Marketing Outlook 2026 » d’Onclusive, avec la contribution de Christophe Thil, est disponible en téléchargement sur le site d’Onclusive.
